La guérison du diabète de type 1 pourrait être l’héritage du Canada

L’article d’opinion suivant, rédigé conjointement par Jessica Diniz, présidente et cheffe de la direction de Percée DT1, et Cate Murray, présidente-directrice générale du Réseau de cellules souches, a été publié dans The Hill Times le 30 octobre.

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De l’insuline à la thérapie régénératrice, la contribution du Canada à la recherche sur le diabète est inégalée. La question est de savoir si nous continuerons à nous distinguer ou si nous regarderons les autres franchir la ligne d’arrivée. 

Il y a un siècle, une découverte canadienne a changé le monde. Après que Frederick Banting et Charles Best aient isolé l’insuline à l’Université de Toronto en 1921, un diagnostic de diabète de type 1 n’était plus une condamnation à mort. Avant l’insuline, la plupart des patient·e·s survivaient à peine deux ans; désormais, ils pouvaient vivre pleinement. Quarante ans plus tard, deux autres Canadiens, Ernest McCulloch et James Till, ont prouvé l’existence des cellules souches, donnant naissance à la médecine régénératrice — une approche qui ne traite pas les symptômes, mais régénère les tissus pour remplacer ceux endommagés par la maladie.  

Ces moments ont défini l’innovation médicale canadienne — la preuve que ce qui commence dans nos laboratoires peut transformer des millions de vies. Aujourd’hui, un autre moment semblable approche. 

Une deuxième révolution canadienne dans les soins du diabète 

Environ 300 000 Canadien·ne·s vivent avec le diabète de type 1, et près de 12 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année — soit environ 33 personnes par jour. Ces personnes vivent dans une vigilance constante : piqûres au doigt, injections, pompes, moniteurs de glucose, calculs de glucides, alarmes, et la peur constante des baisses soudaines de glycémie — sans parler des complications graves comme la cécité, l’insuffisance rénale ou l’amputation. Imaginez maintenant un avenir où cette vigilance pourrait s’alléger.  

Une société canadienne de biotechnologie a mis au point un implant tissulaire qui détecte la glycémie du patient et libère automatiquement l’insuline, éliminant ainsi les injections quotidiennes. Une autre équipe mène des essais cliniques pour infuser des cellules d’îlots pancréatiques productrices d’insuline dans le foie du patient, supprimant les dangereuses « crises d’hypo » et la nécessité de greffes invasives du pancréas. Des chercheur·euse·s canadien·ne·s conçoivent aussi des produits thérapeutiques implantables qui ne nécessitent ni immunosuppression ni risque de rejet. Et des thérapies en phase précoce reprogramment le corps pour régénérer naturellement des cellules productrices d’insuline. Certains osent déjà prononcer le mot guérison

Ce ne sont pas des rêves. Ce sont des réalités canadiennes. Et quand le Canada est à la tête de la bioscience, tout le monde en bénéficie. Les patient·e·s ont un accès précoce aux innovations de pointe. Les chercheur·euse·s restent au pays, les investisseurs soutiennent l’innovation canadienne, les fabricants choisissent le Canada, et le système de santé sauve des vies tout en réduisant les coûts. C’est un cercle vertueux.   

Quand nous prenons du retard, ces avantages s’en vont ailleurs — pendant que les patient·e·s canadien·ne·s attendent et que les biotechnologie d’ici dépérissent. 

Imaginez la femme âgée injectant son insuline avec des mains tremblantes, l’adolescent·e nouvellement diagnostiqué·e, la mère apprenant que son tout-petit devra dépendre de doses quotidiennes pour rester en vie et qu’il risque de graves complications à l’avenir. Imaginez maintenant qu’on leur annonce l’espoir d’une guérison — née dans des laboratoires et des hôpitaux canadiens. 

De la découverte à la thérapie révolutionnaire : bâtir le pont 

Mais l’espoir n’est pas une stratégie. Pour transformer les percées en traitements, le Canada doit créer les conditions nécessaires à la prospérité de l’innovation — du laboratoire au chevet du patient.  

Préparation politique. Le Canada a besoin d’une voie réglementaire spécialisée pour les thérapies avancées : un régime moderne, rationalisé et transparent, soutenu par un système d’accompagnement gouvernemental. Imaginez un guichet unique pour naviguer à travers les réglementations, les évaluations, les incitatifs et les infrastructures nécessaires aux essais cliniques, à la fabrication et à la commercialisation — afin que les biotechnologies canadiennes puissent attirer des essais cliniques internationaux et accélérer le passage de l’idée à l’impact. 

Préparation du système. Les clinicien·ne·s, les hôpitaux et les systèmes de santé doivent être prêts à intégrer ces thérapies aux soins. Un effort national de formation par les collèges professionnels et les réseaux de santé permettrait aux prestataires de se préparer à les administrer en toute sécurité. Nous devons aussi établir des Centres d’excellence régionaux en diabète et en médecine régénératrice — des pôles réunissant chercheur·euse·s, clinicien·ne·s, patient·e·s et expert·e·s en bioproduction pour accélérer les essais cliniques et l’accès tout en ancrant l’expertise au Canada. 

Préparation à l’investissement. La recherche n’est pas un centre de coûts; c’est le moteur de la santé et de la richesse futures du Canada. Nous devons financer la recherche et construire de meilleurs modèles d’investissement, de financement et d’approvisionnement : un remboursement basé sur les étapes franchies pour réduire les risques des investisseurs privés, et une approche d’« achat canadien » qui crée un marché pour les thérapies locales. 

Préparation à l’information. La confiance du public envers la médecine régénératrice ne peut être tenue pour acquise. Trop de mythes entourent encore la science des cellules souches, brouillant la frontière entre débat éthique et innovation salvatrice. Ce n’est pas une science à craindre — c’est une science qui nous propulse une génération en avant pour sauver des vies. 

Responsabilité et leadership 

En fin de compte, c’est la volonté politique qui déterminera notre réussite. Le Canada a le talent, la science et l’opportunité. Il faut maintenant les unir. 

Nous l’avons déjà fait. Le Canada a lancé des collaborations mondiales sur les vaccins, créé des instituts de génomique et mis en place des supergrappes d’innovation. Nous pouvons faire de même pour le diabète et la médecine régénératrice — des domaines où nous excellons déjà. 

Le gouvernement fédéral identifie déjà des projets d’importance nationale dans les secteurs de l’énergie et du transport et les aide à franchir la bureaucratie. Pourquoi ne pas faire la même chose pour la santé? Avec une incidence aussi élevée au Canada, le diabète de type 1 est à la fois un fardeau pour les Canadien·ne·s et un domaine d’excellence en recherche. Misons là-dessus. 

La prochaine découverte médicale marquante du siècle peut, encore une fois, venir du Canada — et encore une fois, concerner le diabète. C’est à nous de décider si nous mettrons en place les conditions pour que cela se réalise. 

Jessica Diniz est présidente et cheffe de la direction de Percée DT1 Canada (auparavant FRDJ)  

Cate Murray est présidente-directrice générale du Réseau de cellules souches 

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